A l'attention du gouvernement français
Objet : Cessez de nourrir l'élevage industriel
Madame la/ Monsieur le Ministre,
Nous, soussignés, nous joignons à l'appel mondial lancé à nos gouvernements pour qu'ils mettent fin au plus grand gaspillage alimentaire caché au monde en réduisant l'utilisation des cultures destinées à l'alimentation animale dans l'élevage industriel. Ce gaspillage coûte non seulement cher à la planète et cause des souffrances aux animaux, mais il gaspille également l'argent public. Nous exhortons les gouvernements à donner la priorité à l'alimentation des êtres humains, et non à celle des élevages industriels.
Notre pays traverse une crise agricole majeure, marquée par la précarité des éleveurs, la perte de souveraineté alimentaire, la dégradation des écosystèmes et une dépendance croissante à l'industrialisation de l'agriculture.
Au cœur de cette impasse : la dépendance structurelle de l'élevage français vis-à-vis de l'industrie de l'alimentation animale, subventionnée par des aides indifférenciées à l'hectare, ainsi que vis-à-vis des importations de soja et de céréales destinés à nourrir les animaux d'élevage et des engrais issus des énergies fossiles nécessaires à leur production.
Cette dépendance massive affaiblit notre autonomie, augmente notre empreinte écologique et alimente un modèle intensif incompatible avec les objectifs climatiques, la préservation de la biodiversité et le bien-être animal.
Le mouvement observé au cours des dix dernières années montre une accélération de l'industrialisation de l'élevage, dans des secteurs jusqu'ici préservés, comme l'élevage laitier, ce qui accroît notre dépendance et conduit à un manque de souveraineté alimentaire. C'est dans le domaine de l'alimentation animale que la souveraineté est véritablement compromise.
En France :
- 80 % de nos engrais synthétiques sont importés, souvent de Russie ; depuis le début de la guerre en Ukraine, les importations françaises d'engrais russes ont augmenté de 86 %.
- 95 % du soja utilisé pour l'alimentation animale est importé, principalement consommé par la volaille et les bovins laitiers et mixtes. 3 millions de tonnes de notre soja sont importées chaque année pour nourrir les animaux.
Les fonds publics, tels que les paiements directs de la PAC, soutiennent massivement un système qui profite à l'industrie de l'alimentation animale et détériore notre sécurité alimentaire au lieu de renforcer notre capacité à produire des denrées alimentaires destinées à la consommation humaine. Les paiements indifférenciés à l'hectare financent la production céréalière, dont plus de 50 % est destinée à l'alimentation animale, sans distinction entre les utilisations et les systèmes de production qu'ils alimentent.
L'élevage agroécologique, quant à lui, sert de vitrine sans bénéficier d'un soutien durable issu d'une vision durable.
C’est pourquoi nous appelons à la mise en place d’un Plan pour « Nourrir les humains, pas l’élevage industriel », dont l’objectif principal est la réduction des cultures destinées à l’alimentation animale industrielle. En limitant l’usage des denrées alimentaires pour ces élevages, nous pouvons libérer des ressources, y compris des fonds publics, afin de mettre plus d’aliments sains et abordables dans les assiettes des Français et de soutenir des systèmes agricoles qui garantissent de bonnes conditions de vie aux animaux.
En France, nous appelons à une transformation ambitieuse de notre élevage, fondée sur les principes suivants :
- La souveraineté de nos systèmes d'alimentation animale, en favorisant les prairies permanentes, les cultures fourragères locales et les sous-produits agricoles. Chaque filière animale doit inclure des objectifs d'autonomie protéique dans son plan de développement, quitte à revoir à la baisse ses projections de production si cette autonomie s'avère difficile à atteindre.
- L'ajustement de la taille du cheptel et de la consommation de produits animaux afin de sécuriser la production et de réorienter la consommation en fonction de la capacité de nos territoires à nourrir les animaux et les habitants, et ainsi limiter les importations massives d'aliments pour animaux et d'intrants agrochimiques.
- Soutien aux éleveurs engagés dans des pratiques agroécologiques, respectueuses des sols, des animaux et des équilibres naturels, et reconnaissance de leur rôle central dans la vitalité des territoires ruraux, la qualité de notre alimentation et la lutte contre le changement climatique.
- Réorientation des aides publiques, en particulier la PAC qui ne doit plus être une aide à l'hectare finançant l'industrie de l'alimentation animale sans considération des modes de production, mais aussi une aide à l'installation et à l'investissement dans les Régions, qui doit être correctement orientée vers des systèmes d'élevage durables, autonomes et résilients.
- Adaptation de notre politique alimentaire visant à réduire la part des aliments issus de l'agriculture intensive, en particulier pour la production de volaille, de porc et de saumon, y compris dans la restauration hors domicile, et grâce à des programmes alimentaires territoriaux qui soutiennent activement la demande de produits sains et respectueux du bien-être animal. Nous croyons en une agriculture à taille humaine, ancrée dans les territoires, porteuse de sens, de justice sociale et de résilience écologique. Une agriculture qui respecte les animaux et nourrit les humains sans mettre leur santé en danger ni épuiser la planète. Ensemble, nous pouvons construire un système alimentaire plus juste et plus durable, qui nourrit les populations, protège les animaux et préserve notre planète pour les générations futures.
Nous croyons en une agriculture à taille humaine, ancrée dans les territoires, porteuse de sens, de justice sociale et de résilience écologique. Une agriculture qui respecte les animaux et nourrit les humains sans mettre leur santé en danger ni épuiser la planète.
Ensemble, nous pouvons construire un système alimentaire plus juste et plus durable, qui nourrit les populations, protège les animaux et préserve notre planète pour les générations futures.